Nouvelle loi pour la gestion de la crise sanitaire
La loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire publiée le 23-1-2022 qui instaure le passe vaccinal est entrée en application le 24-1-2022. Présentation des mesures impactant les employeurs et leurs salariés et intervenants dans leur entreprise.
Après le passe sanitaire, s’applique le passe vaccinal
Conditions de l’exigence d’un passe vaccinal. Depuis le 24-1-2022 jusqu'au 31-7-2022, l'accès des personnes âgées d'au moins 16 ans à certains lieux, établissements, services ou évènements est subordonné à la présentation d'un justificatif de statut vaccinal concernant la Covid-19 (et non plus un passe sanitaire) (loi art. 1er, I, 2°). Il s’agit des lieux, établissements, services ou évènements où sont exercées les activités suivantes :
- les activités de loisirs ;
- les activités de restauration commerciale ou de débit de boissons (sauf la restauration collective, la vente à emporter de plats préparés et la restauration professionnelle routière et ferroviaire) ;
- les foires, séminaires et salons professionnels ;
- les déplacements de longue distance par transports publics interrégionaux qui étaient soumis au passe sanitaire, sauf en cas d'urgence faisant obstacle à l'obtention du justificatif requis ou pour un motif impérieux d'ordre familial ou de santé et à condition de de présenter un résultat négatif au test de dépistage à la Covid-19.
- les grands magasins et centre commerciaux sur décision du préfet lorsque leurs caractéristiques la gravité des risques de contamination le justifient.
Bon à savoir. Restent subordonnés à la présentation du passe sanitaire (résultat négatif d’un test de dépistage à la Covid-19 ou un justificatif de statut vaccinal contre la Covid-19 ou un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la Covid-19) :
- l'accès des personnes âgées de moins 12 ans aux services et aux établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, des personnes qui les accompagnent ou leur rendent visite ainsi que des personnes accueillies pour des soins programmés, sauf en cas d’urgence ;
- l'accès des personnes âgées de 12 à 15 ans inclus les lieux, établissements, services ou événements où sont exercées les activités visées par le passe vaccinal (activités de loisirs et de restauration commerciale ou de débit de boissons (sauf restauration collective, vente à emporter de plats préparés et restauration professionnelle routière et ferroviaire), les foires, séminaires et salons professionnels et les déplacements de longue distance par transports publics interrégionaux, sauf en cas d'urgence faisant obstacle à l'obtention du justificatif requis) (loi art. 1er, I, 2°-a).
Salariés de ces activités soumis au passe vaccinal. L’obligation de présenter un passe vaccinal s’applique au public, mais aussi aux salariés et personnes non soumis à l’obligation de vaccination qui interviennent dans ces lieux, établissements, services ou événements concernés lorsque la gravité des risques de contamination en lien avec l'exercice des activités qui y sont pratiquées le justifie (loi art. 1er, I, 2°-a ; décret 2022-51 du 22-1-2022 art 1er, JO du 23).
Le passe vaccinal est exigé lorsque le travail du salarié se déroule dans les espaces et aux heures où les lieux sont accessibles au public, sauf pour les activités de livraison et sauf intervention d'urgence.
À défaut de présentation un justificatif de son schéma vaccinal complet, l'accès à l'établissement, au lieu, au service ou à l'évènement est refusé, sauf si le salarié justifie d'un certificat médical de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19 ou d'une contre-indication médicale à la vaccination établie par un certificat médical (décret 2022-51 art 1er, 5°-a).
Rappel. Un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19 est délivré sur présentation d'un document mentionnant un résultat positif à un examen de dépistage RT-PCR ou à un test antigénique réalisé plus de 11 jours et moins de 6 mois auparavant. Ce certificat n'est valable que pour une durée de 6 mois à compter de la date de réalisation de l'examen ou du test mentionnés à la phrase précédente (décret 2021-699 du 1-6- 2021 art. 2-2,3°).
Dérogation : justificatif d’engagement dans un schéma vaccinal. Le salarié, qui justifie avoir reçu une première dose d’un vaccin depuis au plus 4 semaines et au plus tard le 15-2-2022, peut continuer à accéder à son lieu de travail s’il présente à son employeur un justificatif de sa première dose et le résultat négatif d’un test PCR ou antigénique de dépistage à la Covid-19 réalisé moins de 24 heures avant l'accès sur le lieu de travail (décret 2022-51 art. 1er, 5°-a). Cette alternative vaut justificatif de statut vaccinal, le temps qu’il achève son schéma vaccinal (injection d’une deuxième et troisième dose).
Conséquences pour les salariés ne produisant pas de passe vaccinal. Si un salarié soumis à l'obligation de présenter un passe vaccinal ne présente pas de justificatif requis (passe vaccinal, certificat de rétablissement ou certificat médical de contre-indication au vaccin) et s'il ne choisit pas d'utiliser, avec l'accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés, l’employeur doit lui notifier, par tout moyen, le jour même, la suspension de son contrat de travail. Cette suspension s'accompagne de l'interruption du versement de sa rémunération et prend fin dès que le salarié produit les justificatifs requis.
Si cette situation se prolonge au-delà de 3 jours travaillés, l'employeur doit convoquer le salarié à un entretien afin d'examiner avec lui les moyens de régulariser sa situation, notamment les possibilités d'affectation, le cas échéant temporaire, au sein de l'entreprise sur un autre poste non soumis à cette obligation (loi art. 1er, I, 2°-c).
Présentation et contrôle des documents justificatifs. La présentation du passe vaccinal et du passe sanitaire doit être réalisée sous une forme ne permettant pas aux autorités et aux employeurs chargés de leur contrôle d'en connaître la nature et ne s'accompagne d'une présentation de documents officiels d'identité que lorsque ceux-ci sont exigés par des agents des forces de l'ordre.
Toutefois, s’il existe des raisons sérieuses de penser que le document présenté ne se rattache pas à la personne qui le présente, les personnes et services autorisés à en assurer le contrôle, notamment l’employeur, peuvent lui demander de produire un document officiel comportant sa photographie afin de vérifier la concordance entre les éléments d'identité, à condition de se fonder sur des critères excluant toute discrimination entre les salariés pour effecteur cette vérification.
Dans ce cas, l’employeur n’est pas autorisé à conserver ou à réutiliser ce document d’identité ou les informations qu'il contient, sous peine de sanctions (loi art. 1er, I, 2°-b).
Contrôle et sanctions en cas de fraude
L’exploitant d’un établissement recevant du public (ERP) soumis au passe vaccinal ou au passe sanitaire est autorisé à en contrôler la détention par les personnes souhaitant y accéder.
Si l'exploitant d'un lieu ou d'un établissement ou le professionnel responsable d'un évènement ne contrôle pas la détention, par les personnes qui souhaitent y accéder, du passe vaccinal ou du passe sanitaire, il est mis en demeure par l'autorité administrative, sauf en cas d'urgence ou d'évènement ponctuel, de se conformer aux obligations qui sont applicables à l'accès au lieu, établissement ou évènement concerné.
La mise en demeure doit indiquer les manquements constatés et fixe un délai, qui ne peut être supérieur à 24 heures ouvrées, à l'expiration duquel l'exploitant d'un lieu ou établissement ou le professionnel responsable d'un évènement doit se conformer auxdites obligations.
Si la mise en demeure est infructueuse, l'autorité administrative peut ordonner la fermeture administrative du lieu, établissement ou évènement concerné pour une durée maximale de 7 jours. La mesure de fermeture administrative est levée si l'exploitant du lieu ou établissement ou le professionnel responsable de l'évènement apporte la preuve de la mise en place des dispositions lui permettant de se conformer auxdites obligations.
Sanctions en cas d’absence de contrôle. Si un manquement à ce contrôle est constaté, l’exploitant est passible d’une contravention de 5e classe, soit d’une amende de 1 500 € pour la première infraction et de 3 000 € en cas de récidive. Si ce manquement est constaté à plus de 3 reprises dans un délai de 45 jours, les faits sont punis d’un an mois d'emprisonnement et de 9 000 € d'amende (loi art. 1er, I, 2°-d).
Contrôle des ERP. Les agents de contrôle habilités à constater les infractions peuvent accéder, pendant les horaires d'ouverture au public, aux lieux, établissements, services ou événements concernés afin de contrôler la détention par les personnes qui s'y trouvent du passe vaccinal ou sanitaire ainsi que le respect par l'exploitant ou le professionnel responsable de son obligation de contrôle de la détention de ces documents.
Bon à savoir. La détention frauduleuse d’un faux passe vaccinal ou sanitaire est punie de 3 ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende. La peine est portée à 5 ans d'emprisonnement et à 75 000 € d'amende en cas de détention frauduleuse de plusieurs faux documents.
Éviter la sanction par la vaccination. Si une personne ayant commis une infraction de non-présentation du passe, d’usage ou détention d’un faux passe justifie s'être fait administrer, dans les 30 jours à compter de la date de l'infraction, une dose d’un vaccin contre la Covid-19, elle ne subira aucune sanction.
Si cette personne a commis l'infraction avant le 24-1-2022 et que l’action publique n’est pas éteinte, le délai de 30 jours pour se faire administrer une dose de vaccin et échapper à toute sanction court à compter du 24-1-2022.
Enfin, si cette personne a réalisé, dans le délai de 30 jours à compter de la date de l’infraction, un test de dépistage à la Covid-19 qui est positif, le délai de 30 jours est suspendu à compter de la réalisation de ce test jusqu'à la date à laquelle cette contamination cesse de faire obstacle à l'administration d'une dose de vaccin. Dès la présentation du justificatif de l'administration d'une dose de vaccin, il est mis fin à la procédure de recouvrement (loi art. 1er, I, 2°-e).
Contrôle de la santé au travail
Situation dangereuse liée à la Covid-19. Lorsque la situation dangereuse dans l’entreprise résulte d'un risque d'exposition à la Covid-19 du fait du non-respect par l'employeur des principes généraux de prévention (non-respect des obligations de l’employeur pour assurer la sécurité et protéger la santé de des salariés notamment, l’absence d’‘actions de prévention pour éviter les risques de contamination (ex. défaut d’aménagement des espaces de travail ou de régulation des flux de circulation dans les locaux pour éviter les contacts ou absence du port du masque) ou l’absence de mise en place d’une organisation du travail et des moyens adaptés, telle que le télétravail, C. trav. art. L 4121-1 à L 4121-5 et L 4522-1), le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (le dreets) peut, sur le rapport de l'agent de contrôle de l'inspection du travail et sous réserve de l'absence de poursuites pénales, prononcer une amende à l'encontre de l'employeur si, à l'expiration du délai d'exécution de la mise en demeure, l'agent de contrôle de l'inspection du travail constate que la situation dangereuse n'a pas cessé (loi art. 2, I).
Rappel. Le dreets, sur le rapport de l'agent de contrôle de l'inspection du travail constatant une situation dangereuse, peut mettre en demeure l'employeur de prendre toutes mesures utiles pour y remédier, si ce constat résulte notamment d'un non-respect par l'employeur des principes généraux de prévention (C.trav. art. L 4721-2). Ainsi, si cette mise en demeure préalable n’est pas respectée par l’employeur, et si celui-ci n’est pas poursuivi pénalement, il est passible d’une amende administrative.
Montant de l’amende. Le montant maximal de l'amende est de 500 € et peut être appliqué autant de fois qu'il y a de salariés concernés par le manquement. Le montant total de l'amende ne peut être supérieur à 50 000 €.
L’employeur peut former un recours hiérarchique contre la décision du dreets prononçant l’amende, qui est suspensif. Ce recours doit être formé devant le ministre chargé du travail, par lettre recommandée avec AR, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision. Le silence gardé par le ministre pendant plus 2 mois vaut décision d'acceptation du recours.
Bon à savoir. En revanche, la mise en demeure prononcée par le dreets en raison de la constatation d'une situation dangereuse résultant d'un risque d'exposition à la Covid-19 du fait du non-respect par l'employeur des principes généraux de prévention ne peut pas être contestée par l’employeur (loi art. 2, II ; C. trav. art. L 4723-1, al. 1).
Cette procédure de contrôle s’applique aux situations dangereuses résultant d'un risque d'exposition à la covid-19 du fait du non-respect par l'employeur des principes généraux de prévention, constatées par les agents de contrôle de l'inspection du travail jusqu'à une date déterminée par décret, et au plus tard jusqu'au 31-7-2022 (loi art. 2, III).
Report de certaines visites médicales
Certaines visites médicales dans le cadre du suivi individuel de l'état de santé des salariés devant être réalisées entre le 15-12-2021 et une date fixée par décret, et au plus tard le 31-7-2022 peuvent faire l'objet d'un report dans la limite d’un an à compter de cette date d’échéance et être organisées par les services de santé au travail (SST), dans des conditions définies par décret, sauf si le médecin du travail estime indispensable de maintenir la visite, compte tenu notamment de l'état de santé du salarié ou des caractéristiques de son poste de travail (loi art. 10).
Il s’agit des examens médicaux suivants :
- les visites d'information et de prévention (C. trav. art. L 4624-1) ;
- les examens médicaux d'aptitude pour les salariés bénéficiant d'un suivi individuel renforcé de son état de santé (C. trav. art. L 4624-2) ;
- les visites et examens médicaux d’aptitude d’embauche et des salariés faisant l’objet d’une surveillance médicale de leur état de santé selon des modalité particulières (salariés intérimaires, en CDD, salariés saisonniers, salariés détachés C. trav. art. L 4625-1-1).
Le décret déterminera notamment les exceptions ou les conditions particulières au report des visites médicales applicables aux salariés faisant l'objet d'un suivi adapté ou régulier (C. trav. art. L 4624-1) ou d'un suivi individuel renforcé (C. trav. art. L 4624-2).
À noter. Le report de la visite ne fait pas obstacle à l'embauche ou à la reprise du travail.
Visites médicales déjà reportées. Par ailleurs, les visites médicales dont l’échéance a déjà été reportée (en application de l’ordonnance 2020-1502 du 2-12-2020) et qui aurait dû intervenir entre le 15-12-2021 et une date fixée par décret, et au plus tard le 31-7-2022, peuvent être encore être reportées dans la limite de 6 mois supplémentaires à compter de cette échéance.
Exonération des cotisations sociales patronale et aide au paiement des cotisations prolongées
La loi permet au Gouvernement de reconduire, par décret, les mesures d’exonération des cotisations sociales patronales et d’aide de 20 % au paiement des cotisations sociales, instaurées par l’article 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, pour les employeurs de moins de 250 salariés les plus touchés par les conséquences de la crise sanitaire pour des périodes d’emploi courant jusqu'au 31-7-2022 (loi art. 11).
Pour ces employeurs dont l'activité reste particulièrement affectée par les conséquences économiques et financières de la propagation de l'épidémie de Covid-19 ou par les mesures d'interdiction d'accueil du public, ce décret peut préciser les conditions dans lesquelles ils peuvent continuer à bénéficier de tout ou partie de ces exonérations ou aides.
Ce décret peut notamment retenir une condition de baisse de chiffre d'affaires différente de celle prévue par l’article 9, I de la LFSS pour 2021 (baisse du chiffre d’affaires d’au moins 50 % par rapport à la même période de l'année précédente) ou limiter le niveau des rémunérations éligibles à ces dispositifs.
Ce décret peut aussi prévoir que pour certaines périodes qu'il détermine, les exonérations ou aides portent sur les cotisations et contributions sociales dues au titre de la période d'emploi au cours de laquelle les conditions de bénéfice du dispositif sont satisfaites, ou que le bénéfice de ces exonérations ou aides n’est pas cumulable avec le bénéfice d'autres dispositifs poursuivant les mêmes objectifs.
Le bénéfice de la prolongation de ces dispositifs est soumis, pour l'ensemble des secteurs, à une interdiction totale d'accueil du public ou à une condition de baisse d'activité.
Ce décret peut également reporter les dates pour bénéficier d’un plan d’apurement des dettes de cotisations conclu avec l’Urssaf (LFR pour 2020 2020-935 du 30-7-2020 art. 65, VI).
Sources : loi 2022-46 du 22-1-22 art. 1, 2, 10 et 11, JO du 23 ; décret 2022-51 du 22-1-2022, JO du 23 ; Conseil constitutionnel, décision 2022-835 DC du 21-1-2022, JO du 23
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