Harcèlement sexuel à l’Université
Au regard de la gravité des comportements d’un enseignant-chercheur vis-à-vis d’étudiantes, la sanction du blâme n’est pas une mesure suffisante.
Sont constitutifs de harcèlement sexuel et, comme tels, passibles d'une sanction disciplinaire, les propos, ou des comportements à connotation sexuelle, répétés ou même, lorsqu'ils atteignent un certain degré de gravité, non répétés, tenus dans le cadre ou à l'occasion du service, non désirés par celui ou celle qui en est le destinataire et ayant pour objet ou pour effet soit de porter atteinte à sa dignité, soit, notamment lorsqu'ils sont le fait d'un supérieur hiérarchique ou d'une personne qu'elle pense susceptible d'avoir une influence sur ses conditions de travail ou le déroulement de sa carrière, de créer à l'encontre de la victime, une situation intimidante, hostile ou offensante.
Un président d’Université avait engagé des poursuites disciplinaires contre un enseignant chercheur. La section disciplinaire du conseil académique de cet établissement lui a infligé à la sanction du blâme. Sur appel de l’Université, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), statuant en matière disciplinaire, a également infligé cette sanction à l’enseignant chercheur. Le Conseil d’État vient d’annuler la décision du CNESER et lui a renvoyé l’affaire.
Il était notamment reproché à l’enseignant-chercheur d’avoir « proposé à plusieurs étudiantes de son groupe de travaux dirigés, qui avaient sollicité un entretien avec lui pour échanger sur la notation de leurs copies, de se rendre au restaurant ou de lui rendre visite à son domicile, en fin de semaine ou le soir » ; d’avoir, lors d’un entretien en tête-à-tête, proposé un massage à une étudiante souffrante, et également d’avoir « assorti l'un de ses messages d'invitation à une soirée privée à l'une de ses étudiantes d'un commentaire sur son apparence physique et sur celui d'une de ses amies à qui était également destinée son invitation ».
Le Conseil d’État décide dans cette affaire qu’en « jugeant que ces faits répétés à l'encontre de certaines étudiantes, qui ont créé une situation intimidante et offensante pour elles, n'étaient pas constitutifs de harcèlement sexuel, le CNESER, statuant en matière disciplinaire, a inexactement qualifié les faits de l'espèce et, eu égard à la nature de ces faits et à la relation d'autorité qui est celle d'un enseignant-chercheur avec ses étudiants ainsi qu'à l'exemplarité et l'irréprochabilité qui, par suite, lui incombent, retenu une sanction hors de proportion avec les fautes commises ».
CE 10 mars 2023, n° 456602
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