Enfant sans vie : double obligation de l’établissement de santé
L’hôpital qui incinère le corps d’un enfant né sans vie avant un délai de dix jours commet une faute, même lorsqu’il a agi avec l’accord des parents, à l’égard desquels il est lié par une obligation d’information sur la procédure. C’est ce que juge le Conseil d’État dans un arrêt du 19 septembre 2023.
Une femme qui avait accouché d’un enfant mort-né a quitté l’hôpital le lendemain, après avoir signé, avec son conjoint, un document autorisant l’établissement à « effectuer en leur lieu et place les formalités d’inhumation de l’enfant ». Cinq jours plus tard, l’hôpital a fait procéder à la crémation de la dépouille. Et cinq ans après, la femme engage la responsabilité de l’établissement arguant d’un préjudice moral lié au fait de ne pas avoir pu elle-même procéder aux funérailles ni y assister. Elle obtient finalement gain de cause.
L’article R. 1112-75 du code de la santé publique dispose en effet que « la mère ou le père dispose, à compter de l’accouchement, [d’un délai de dix jours] pour réclamer le corps de l’enfant pouvant être déclaré sans vie à l’état civil ». Aussi le Conseil d’État en déduit-il que la conservation du corps durant dix jours est une obligation pour l’établissement de santé. Par ailleurs, il considère qu’il appartient à l’hôpital « de délivrer aux parents une information complète et appropriée leur permettant d’exercer dans le délai qui leur est imparti […] le choix qui leur appartient. À ce titre, il doit porter à leur connaissance l’existence de ce délai et les conditions dans lesquelles le corps sera pris en charge s’ils ne le réclament pas ».
En l’occurrence, le Conseil constate donc la faute de l’établissement dans l’organisation du service, à la fois de ne pas avoir informé la femme des modalités possibles de prise en charge du corps et de ne pas avoir conservé celui-ci durant les dix jours règlementaires. En réparation du préjudice moral de l’intéressée, il condamne le centre hospitalier à lui verser la somme de 4 000 €.
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