À propos de la parenté transgenre…
Selon la Cour européenne des droits de l’homme, le refus des autorités étatiques d’inscrire sur l’état civil un homme transgenre en tant que père ou une femme transgenre en tant que mère ne viole pas la Convention européenne des droits de l’homme.
Dans la première affaire, le parent transgenre, de nationalité allemande, est déclaré né de sexe féminin. En 2011, il obtient le changement de sexe à l’état civil avec changement de prénom, tout en conservant son appareil reproducteur féminin. En 2013, il accouche d’un garçon né d’un don de sperme, le donneur ayant consenti à ne pas avoir le statut de père légal de l’enfant. Le parent transgenre demande alors au service de l’état civil de l’inscrire comme père de l’enfant et de laisser libre la case prévue pour consigner le nom de la mère. L’officier de l’état civil s’interroge toutefois quant à la question de savoir si le parent transgenre doit être inscrit en tant que père ou en tant que mère de l’enfant.
En première instance, en appel puis au niveau fédéral, les juges statuent dans le sens de l’inscription en tant que mère. Quant à la Cour européenne, elle se prononce sur la conventionnalité de la décision de la Cour fédérale de justice au regard de l’article 8 de la Convention.
Tout d’abord, elle écarte l’atteinte au droit au respect de la vie familiale au motif que les requérants (le parent transgenre et l’enfant) « vivent ensemble dans une relation parent-enfant et que l’existence du lien de parenté entre eux n’est pas contestée en soi ». S’agissant ensuite de l’ingérence alléguée dans l’exercice du droit au respect de leur vie privée, la Cour européenne souligne l’absence de consensus sur la question de savoir comment indiquer, dans les registres de l’état civil concernant un enfant, que l’une des personnes ayant la qualité de parent est transgenre. Elle considère dès lors que les États jouissent, en la matière, d’une large marge nationale d’appréciation.
Eu égard, par ailleurs, au fait que le lien de filiation entre les requérants n’a pas été mis en cause en soi et au nombre limité de situations pouvant mener, lors de la présentation d’un acte de naissance de l’enfant, à la révélation de l’identité transgenre du parent, la Cour conclut à l’absence de violation de l’article 8.
Dans la seconde affaire, la CEDH retient la même solution à propos d’un parent transgenre né de sexe masculin et ayant obtenu la reconnaissance judiciaire de son changement de genre. Sa compagne avait accouché de leur fils conçu avec les gamètes mâles du parent transgenre, lequel a été inscrit dans le registre des naissances comme père de l’enfant, et non comme deuxième mère.
CEDH 4 avr. 2023, n° 53568/18 et n° 7246/20
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